L’enduro des lacs de Moirans était l’un des objectifs majeurs de l’année. Depuis longtemps cette course traine une réputation méritée d’enduro difficile. Cette année la réputation était plus que largement méritée.

Voici donc le résumé des pérégrinations d’un pilote de L2 en galère sur deux tours.

Une fois n’est pas coutume cet enduro se déroule un samedi. Idéal pour profiter du 14 juillet, un petit jour de congé m’a permis de partir en fin de matinée avec mon fidèle J5 et d’arriver un peu avant 16h sur le site de la SP1.

La reconnaissance de la spéciale a été longue mais utile car les sous-bois glissants étaient de la partie. Cela donnait déjà un aperçu des chemins de liaison avec le mixe entre les pierres lisses et la terre humide qui se colle dessus. La spéciale est longue, je retrouve Fredo et Simba en cours de marche et on termine ensemble la reco.

En fin de spéciale on tombe sur Pierre Quinonero qui nous donne quelques conseils sur le passage d’une montée bien défoncée. Sur le coup ça laisse songeur.

Comme nous avons le temps pour nous, direction les spéciales suivantes. Surtout la SP3 qui est une extreme. La spéciale est inversée par rapport à l’édition précédente. Elle commence par du sous bois glissant avec de descendre une première fois dans la carrière. La remontée est plus pénible avec un double en montée pour les bons et une trace sur le coté pour nous. Les pierres roulent et la pente est raide, il ne faudra pas hésiter. Retour dans les bois par du roulant avant une bifurcation marquée « dure/facile ». On monte donc coté dur pour voir ce qu’il y a. Après une montée et un passage dans un champ de roches on arrive à une descente franchement impressionnante. Je ne pensais pas voir ça un jour sur une course. Longue et raide, parsemée de pierres et tout en terre glissante. Heureusement qu’il y a une trace « facile ». Pour moi le choix est fait, je préfère perdre du temps à coup sur que de tenter d’en gagner avec de tels risques. Après le contournement deux belles grimpettes glissantes se présentes avec des traces variées. Un peu de plat et hop à nouveau une sélection « dure/facile » pour redescendre dans la carrière. La trace dure présente une belle marche avec une réception dans les pierres avec que la facile est pentue mais régulière. On passe ensuite un premier tronc avant de contourner le saut et ressortie de la carrière par une marche à l’appel en éboulis. Le tracé contourne le haut de la carrière avant de redescendre dans les éboulis vers un pierrier suivi d’une butte et de plusieurs rondins. Virage, encore de beaux troncs et pour finir un tas de rondins avant l’arrivée.

Tous les pilotes rencontrés dans la spéciale sont unanimes. C’est une spéciale dure. Les pilotes pourtant habitués au championnat de France sont impressionnés. On en discutera encore longtemps avec Serge, pilote au France et en L1, qui nous accompagnera pendant la reconnaissance de la spéciale 2.

Cette spéciale 2 est une banderolée quasiment classique avec quelques pièges qui viennent casser la cadence. Il doit être possible d’y aller très vite mais également de s’y faire très mal.

Les reconnaissances terminées direction les contrôles administratifs, puis la petite mousse avec les potes avant de partager une pizza. On fait les derniers pleins et direction le stade pour dormir dans les camions pendant que Fredo et Adeline notre assistance de choc prennent la route de l’hôtel.

Réveil matinal après une nuit fraiche et humide. Je charge la 450 dans le J5 et direction le CT. Pas de soucis, c’est vraiment une formalité. Je passe d’abord la moto de Fredo pendant que Phil cherche la panne de la Zaberg. A mon retour il a trouvé qu’en ouvrant l’essence elle va beaucoup mieux. Ma 300 passe à son tour le CT et trouve une place contre un arbre en attendant le départ. Pendant que sur nos conseils Phil va reconnaitre au moins la SP3 et sa grosse descente je m’installe sur un parking bientôt rejoint par Fredo & Co pour le petit dej. La pression de la course est bien présente. Depuis Faulx je n’ai plus terminé une course et la forme n’est franchement pas là. C’est dur d’avaler quelque chose. Les cafés passent mais les petits pains ont plus de mal.

Voila les pilotes sont en tenues, la voiture de l’assistance est chargée. Nous prenons la direction du parc, le ventre serré et l’esprit affuté. On a une pensée émue pour Vinz qui est bloqué à la maison mais surtout pour Damien Hezette qui nous a quitté tragiquement dimanche dernier. Des autocollants à sa mémoire sont en bonne place sur nos motos et nos casques.

Pendant le papotage d’avant départ on admire la belle 300/2012 en version six-days à peine rodée. Et c’est à nous de grimper sur le podium.

10h07, départ un CH de 55 minutes. Rapidement les premières grimpettes donnent le ton, ça va glisser. Mais pas dans le genre glissade classique de la boue, non un truc bien vicieux plus proche de la plaque de verglas.

De toutes façons pour moi le soucis n’est pas là. Dès le premier bout de route, pourtant bien court je loupe une flèche en suivant un pilote. Le temps de m’en rendre compte et de faire demi-tour j’ai déjà pris pas mal de retard. Je glisse beaucoup et je n’arrive pas à me concentrer sur la moto.

Heureusement la première spéciale arrive. Je suis déjà bien usé, mais au moins je sais où je vais. Le début va bien mais dans une partie technique un pilote que je suis en train de remonter tombe et me bloque, dans l’impossibilité de faire demi-tour ou de l’éviter je dois patienter de longues secondes. La fin de la spéciale se passe bien mais je n’attaque pas franchement, désirant garder des forces pour le reste de la journée.

Le suite du ch1 se passe presque bien. J’arrive à tout passer sans me bloquer mais je dois régulièrement patienter dans les bouchons, c’est franchement rageant d’attendre plus de 10 minutes en bas d’un truc qui passe tout seul. Énervé par les bouchons je me déconcentre et loupe à nouveau une flèche. Arrivée au ch1 avec déjà une valise de pions. Je reste zen, ça ne sert plus à rien de s’énerver, donc plein + compote et hop je pointe. Fredo, Phil et Jean-Marie sont déjà passés avant moi.

Le CH2 est annoncé pour 1h05 avec deux spéciales à faire. Globalement plus facile que le CH1, il est surtout moins encombré. Je roule longtemps seul à une vitesse d’escargot. La spéciale 2 pourtant magnifique est abordée sans grande motivation. Je cherche avant tout à garder des forces pour la liaison. Retour en liaison d’ailleurs bien mouvementé avec quelques descentes bien raides et pas mal de technique avant d’arriver dans la spéciale extrême.

J’ai tellement de retard que j’arrive dans la spéciale 3 à l’heure où j’étais sensé pointer au CH… Tant pis j’y rentre quand même avec le sourire. Le début est effectivement assez simple, la montée de sortie de carrière est une formalité avec une 300 au top de sa forme. Les sous-bois glissent et se creusent, cela me conforte dans mon choix de la trace facile. Un bouchon dans la première grimpette me force à modifier ma trace et je ne peux pas prendre l’élan souhaité, ça monte quand même. Au sommet de la seconde grimpette je trouve Thierry à l’agonie, il faut dire qu’il a monté la moto de son fils en plus de la sienne dans les deux grimpettes, il y a de quoi être dans le rouge. Retour dans la carrière par la descente facile, le reste passe très bien. La marche en sortie, puis les éboulis sont les seuls points risqués. Le pierrier et les troncs sont avalés en douceur et je sors de la spéciale entier et content. Le ch est heureusement juste après la spéciale.

Ravitaillement tranquille, rien de sert de courir les pénalités sont déjà là. A priori beaucoup de monde pointe en retard ou à la limite. En fait seuls 36 pilotes de L2 sur 239 partants ne prendront pas de pénalité. Un coucou à Thierry et Thibault qui sont sortis de la spéciale et j’attaque le ch court. Il y a peu de monde dans ce secteur, c’est bien heureux car les traces ne sont pas très larges et il faut rester concentré. Sur une montée je manque de lucidité et ne vois pas l’échappatoire, je me plante donc derrière un pilote en perdition qui décide de redescendre face à moi. Je passe enfin sur la bonne trace et le ch est bouclé avec à peine deux minutes de pénalité supplémentaires. Je suis assez content de moi sur ce coup là.

Pas de ravitaillement, le dernier ch arrive avec 1h10 de moto à faire. Il est globalement moins dur que les premiers, mais de bonne montées dans les galets glissants rendent quand même la chose usante. Les pilotes en perdition sont nombreux, je dépasse des motos posées dans les bois sans leurs pilotes. Requinqué par le ch court je roule un peu plus vite quand j’arrive sur un pilote accidenté. Le temps de sécuriser le coin et d’attendre l’arrivée des secours avertis par d’autres pilotes je vois passer les pompiers. Pas idéal pour rouler serein, je termine donc mon ch en mode rando. Les quelques difficultés, marches et montées passent bien car il n’y a plus de bouchons. Vers la fin du CH les premiers L3 me dépassent, étrangement ils ont tous ou presque des maillots du MC Moirans, a voir leur aisance sur les chemins glissants je comprends encore mieux la marge de progression qu’il reste.

Une peu de roulant sur les crêtes, une dernière descente et voila la ville. J’arrive au ravitaillement avec 40 minutes de retard. L’assistance n’est plus là mais Serge a la charge de mes bidons. Je suis dans l’état d’esprit de l’abandon. Je vois autour de moi les pilotes en plaques jaunes ou vertes qui chargent les motos. On me dit qu’avec le retard que j’ai ce n’est plus la peine de rouler car je vais être hors course. Heureusement à ce moment là Thierry passe près de moi et me redonne un coup de moral, il se lance dans le second tour avec son fils. Je fais donc rapidement un complément d’essence et je pointe pour continuer la course.

Effectivement le terrain a bien séché, en plus il n’y a plus personne sur les chemins, donc pas de bouchons. Je rentre dans la première spéciale et quelques secondes après j’aperçois la 449 de Thierry lancée à mes trousses. Ce sera une bagarre de longue haleine, je roule au max de mes possibilités avec la hantise de la chute, je me bloque un peu dans des passages serrés en fin de spéciale mais j’arrive tout de même à garder l’avantage. Bilan malgré la fatigue j’ai roulé presque deux minutes plus vite qu’au premier tour.

Thibault sort de la spéciale avec un très bon temps. En plus il a le sourire. On reste donc ensemble pour la suite des liaisons. Thierry ouvre la marche et pose la cadence, on passe très bien dans le reste du CH et j’arrive même dans les temps. Heureusement, Eveline est là pour l’assistance et je profite de l’eau et de l’essence.

Toujours à 3 on continue, le CH2 passe assez facilement mais c’est impossible de rouler vite, on est dans un mode survie avec comme seul objectif de terminer la course. La spéciale 2 arrive, comme à la précédente Thierry se lance à ma poursuite, mais même avec cette motivation je n’arrive pas à garder la cadence sur toute la spéciale, arrivé aux 3/4 les bras ne sont plus là et les crampes dans les jambes rendent tout attaque vaine. Thierry me double très proprement et je me contente ensuite de gérer pour ne pas le laisser prendre trop d’avance. Il me prend quand même 13 secondes alors que j’ai roulé 22 secondes plus vite qu’au premier tour. Il faut décidément que je me mette au sport.

Anthony est là en sortie de spéciale, il a l’air d’avoir bien mal et boite franchement. Heureusement il a une bouteille d’eau à la main, mon camel étant vide il me sauve la mise.

Après un peu de liaison la dernière spéciale arrive. Je laisse partir Thierry qui va aider Thibault dans les deux secteurs pénibles. Contrairement au premier tour je me loupe dans une grimpette et je dois pousser pour arriver en haut à l’agonie. J’aurais surement perdu beaucoup moins de temps en redescendant mais la lucidité n’est plus là depuis longtemps déjà.

C’est très agréable de finir la spéciale devant les spectateurs en masse, en tout cas la motivation revient d’un seul coup et j’enchaine les difficultés assez facilement.

Thierry et Thibault arrivent à la sortie de la spéciale et on rejoint le CH. Un peu d’eau, une barre de céréales, quelques minutes de répit et un coucou à Manu qui passe par là après son tour en L3.

C’est parti, toutes les spéciales sont derrière nous, il reste deux CH à faire avant de rejoindre l’arrivée. Dans les CH serré les premiers inters nous dépassent. On laisse faire en se poussant le plus possible et tous sont courtois. Par contre quelle claque de voir leur vitesse dans les chemins.

Après le CH court nous devons nous pousser régulièrement pour laisser passer les inters puis les L1 qui eux terminent leur troisième tour. Les dernières difficultés sont usantes et l’arrivée sur les crêtes avec la vue sur Moirans est une vraie délivrance. A ce moment il nous reste un peu de descente et l’arrivée nous tendra ses bras.

Nous pointons ensemble avec plus d’une heure cinquante de retard !

Épuisés mais content, nous avons rallié l’arriver. Cet effort était pour nous, mais surtout à la mémoire de Damien qui n’abandonnait pas devant l’adversité.

Aujourd’hui lundi, je me repasse le film de cette journée et les bons souvenirs remplacent tous les moments de doute et de galère. Je suis heureux d’avoir terminé. Bien sur je manque de vitesse dans les chemins glissants, d’attaque dans les spéciales et aussi de technique, mais je suis à la maison entier et finalement assez fier de moi. Il y a quelques semaines encore j’en étais à me trainer avec les béquilles puis l’orthèse et maintenant je peux dire que j’ai terminé l’enduro de Moirans.

Quelques chiffres. En L1 39 classés pour 71 partants, en L2 102 classés pour 239 partants. Soit 57% d’abandons dans notre catégorie et une moyenne de 54% sur les pilotes du championnat.

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